PRESSE

Der Spiegel : Alles, nur nicht Paris

DER SPIEGEL 7 mars 2020

Traduction partielle de l’article de Britta Sandberg dans Der Spiegel du 07.03.2020

A plusieurs centaines de kilomètres au Nord de Perpignan, par un froid samedi matin de février, Violette Spillebout distribue des tracts sur un marché. Elle a 46 ans et est la candidate de La République en Marche. Et c’est bien là son problème. Sa liste a beau s’appeler « Faire respirer Lille », sa proximité avec le gouvernement lui colle à la peau. Le parti fondé pour permettre à Emmanuel Macron d’accéder au pouvoir souffre de devoir porter la responsabilité de la politique menée par l’Elysée. « Votre campagne électorale, je la trouve bien » dit un homme à un stand vendant des huîtres. « Mais mon problème, c’est que vous faites cause commune avec  Emmanuel Macron ». 

Pendant 12 ans, Violette Spillebout a été une proche collaboratrice de la maire socialiste Martine Aubry jusqu’à ce qu’elle quitte la mairie en 2013. Elle veut empêcher Martine Aubry, fille de l’homme politique Européen Jacques Delors, d’obtenir un quatrième mandat de maire. Au bout de 19 ans, l’équipe de Martine Aubry à la mairie est fatiguée et est dans l’auto-satisfaction, dit-elle. De plus, elle a le contrôle sur l’attribution des postes et des subventions dans une grande partie de la ville. 

Tous les samedis, Violette Spillebout se rend sur deux à trois marchés, puis elle enchaîne avec un rendez-vous fixe dans son local de campagne, un apéritif avec les bénévoles de son équipe. Ensuite, elle continue sa campagne avec les associations sportives, les groupes de jeunes, le porte à porte. Depuis des semaines, elle assume quatre à cinq rendez-vous par jour. Pour le soir, elle a inventé la formule « Dîner entre amis » : les hôtes invitent jusqu’à 15 amis, elle vient et répond aux questions concernant son programme. 

C’est ainsi qu’elle a progressé dans les sondages de 5 à tout juste 20% – trop peu pour battre Martine Aubry, mais pas mal pour une première candidature dans des conditions difficiles. 

Récemment, Violette Spillebout a dû déposer plainte, ses meetings de campagne étant régulièrement perturbés par des représentants du parti de gauche « La France insoumise » qui protestent contre la réforme des retraites du gouvernement. Elle n’a pas encore fait remplacer les vitres cassées de son local de campagne, elles risquent d’être à nouveau saccagées dans les jours qui viennent, dit-elle. 

« Nous restons tout de même optimistes, il y a encore beaucoup d’indécis » dit-elle. Dans son programme, il y a beaucoup de propositions qui s’adressent aux électeurs au-delà des partis : investir davantage dans la sécurité, avoir davantage de fonctionnaires de police, des cantines gratuites dans les écoles primaires, verdir de grands espaces urbains et développer un plan anti-solitude pour les citoyens plus âgés. 

L’après-midi, Violette Spillebout rend visite à un club de boxe pour jeunes dans un quartier considéré comme difficile. Elle discute avec les entraineurs, les mères, les bénévoles. Tous se réjouissent de sa venue. Pourtant, ils ne se laisseront pas photographier avec elle : ils craignent que la maire actuelle ne leur supprime la subvention de l’association. 

Les partis traditionnels sont si impopulaires que de nombreux candidats aux municipales se présentent sans étiquette. Ils mettent en avant le fait qu’ils n’ont rien à voir avec les politiques au niveau national.

Pour les instituts de sondage, les résultats du premier tour seront difficiles à interpréter car ils ne rentreront pas dans le schéma classique de l’opposition gauche droite. Actuellement il semble certain que les Verts gagneront plusieurs mairies et que le « Rassemblement national » réussira surtout dans les communes de taille moyenne. Quant au parti de gouvernement d’Emmanuel Macron qui n’existe que depuis quelques années et qui est loin de couvrir tout le territoire, les pronostics sont plutôt mauvais.  Le président est impopulaire. Le parti qui a en son temps balayé tous les autres partis est en difficulté. A Paris, symbole important, sa candidate Agnès Buzyn n’est qu’à la troisième place.  Dans de nombreuses villes LaREM a conclu des alliances et soutient des candidats de gauche ou conservateurs sans présenter les siens. 

Der Spiegel du 7 mars 2020