Un des premiers engagements du journaliste est de commencer par utiliser les mots à bon escient et par manipuler les concepts avec le devoir permanent d’informer précisément ses lecteurs.
Dans son article du 11 novembre dernier, la Voix du Nord s’appuie sur l’analyse de Monsieur Kaddour Qassid, responsable d’Anticor 59, pour titrer : “Institut pour la photographie à Lille : Violette Spillebout (REN) en plein conflit d’intérêts ?” et relayer son article avec un tweet du journaliste Emmanuel Crapet “On peut aussi se poser la question de l’abus de position dominante, puisque @VSPILLEBOUT mouille le gouvernement. Et se demander si le déontologue de l’@AssembleeNat appréciera.”
En une phrase et un tweet, me voici publiquement accusée d’abus de position dominante, de conflit d’intérêt et de non-respect de la déontologie. Il y est fait référence à ma demande publique auprès de la Ministre de la Culture de lancer une inspection des Affaires Culturelles sur le projet d’Institut pour la Photographie.
Aussi, revenons sur ces accusations.
“Légitimité à agir”
Je suis, comme tout citoyen, comme élue locale aussi, parfaitement légitime à m’intéresser au bon maniement des deniers publics, protégé constitutionnellement par le principe constitutionnel dit “de bon usage des deniers publics” découlant de l’ensemble des dispositions des articles 14 et 15 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Le fait que mon mari (ou mes amis ou même électeurs) dirige une association culturelle locale est inopérant.
C’est d’ailleurs ce que je fais scrupuleusement sur de nombreux dossiers et projets Lillois depuis 2019, en alertant régulièrement l’opinion publique : fiasco du Faubourg des Modes (Intervention en conseil Municipal du 21 janvier 2021), danger du projet de piscine à Saint-Sauveur (Conférence de presse du 8 mars 2019 et Intervention en Conseil Municipal du 30 septembre 2022), inquiétude sur le projet Biotope (Intervention en Conseil Municipal du 11 décembre 2020), ou encore dérives et hégémonie financière de l’association Lille 3000 (Intervention en Conseil Municipal du 10 décembre 2021).
Il s’agit donc d’un engagement pour Lille et les Lillois, régulier, tenace, constant. Nous sommes, avec mon groupe d’élus lillois Faire Respirer Lille, les seuls à vigiler et à alerter régulièrement sur les dérives de dépenses publiques et à proposer des actions correctives.
Concernant l’Institut pour la Photographie, il est d’ailleurs assez surprenant et inédit de voir la Voix du Nord faire appel à Anticor pour critiquer la personne qui dénonce la dérive financière du projet plutôt que de s’intéresser à la dérive financière elle-même….
“Conflit d’intérêt”
Un conflit d’intérêts pour un député est défini comme une situation d’interférence entre les devoirs du député et un intérêt privé qui, par sa nature et son intensité, peut raisonnablement être regardée comme pouvant influencer ou paraître influencer l’exercice de ses fonctions parlementaires (décision du Bureau de l’Assemblée nationale du 6 avril 2011).
On voit mal le rapport entre le budget de l’Institut pour la Photographie et «l’exercice des fonctions parlementaires».
A défaut un député ne pourrait plus rien faire, notamment dans sa circonscription, où, et c’est normal, ses électeurs lui font des signalements sur tout.
De la sorte, parler de «conflit d’intérêt» pour cette affaire n’est pas de mise et heurterait même l’exercice des droits constitutionnels.
“Abus de position dominante”
L’abus de position dominante est une notion de droit commercial des affaires (caractérisant une pratique prohibée par l’article L. 420-2 du code de commerce) qui concerne la concurrence entre des entreprises commerciales et n’a rien à voir avec le rôle d’un parlementaire. Pour qu’il y existe un abus de position dominante au sens de l’article L. 420-2, trois conditions doivent être réunies :
- l’existence d’une position dominante sur un marché déterminé, dit « marché pertinent » ;
- une exploitation abusive de cette position ;
- un objet ou un effet, au moins potentiel, restrictif de concurrence sur un marché.
On voit bien à quel point il est abusif d’utiliser de telles accusations pour qualifier l’engagement d’une élue nationale et locale, qui agit dans le cadre de sa mission de contrôle.
Je rappelle que nous sommes 6, les 6 conseillers municipaux Faire Respirer Lille a avoir signé unanimement cette demande d’audit par l’IGAC sur l’Institut pour la Photographie, très loin de la thèse du combat personnel que certains tentent de raconter.
Profondément attachée à la déontologie et à l’honnêteté intellectuelle, je suis co-rapporteur d’une mission flash à l’Assemblée Nationale sur l’éducation critique aux médias. Je m’implique aussi fortement dans la préparation des futurs états généraux de l’Information* qui seront lancés dans les prochains mois.
L’ensemble des acteurs du secteur (journalistes, chercheurs, juristes, plateformes, citoyens…) seront réunis pour débattre des menaces qui pèsent sur le libre accès à de l’information fiable et de qualité, et imaginer un nouveau cadre pour assurer la protection du droit à l’information.
La question de la régulation des situations monopolistiques dans les médias sera placée au cœur de ces États généraux, tout comme le chantier de l’éducation critique aux médias et à l’information et celui de l’exercice du métier de journalistes.
Les travaux menés dans le cadre des Etats Généraux permettront de dégager des pistes d’action concertées avec l’ensemble de la filière, pour garantir le pluralisme des courants de pensées et d’opinions.
Comptez sur moi pour m’y investir !