COMMUNIQUÉSDROIT de RÉPONSEMUNICIPALES 2020

Mon combat pour le droit à la dignité et à la vie privée des élus se poursuit.

Lille, le 12 septembre 2024

Tribune

Je veux ici répondre à la dernière fanfaronnade et au vocabulaire violent (« raclée ») de Jacques Trentesaux, qui se permet d’écrire sur sa propre affaire judiciaire, dans son propre journal Médiacités, puis dans Médiapart, au mépris de toute déontologie journalistique.

Une nouvelle fois, cet homme pervers et manipulateur abuse de sa fonction de journaliste pour justifier son comportement à mon endroit lors des municipales 2020. Il n’hésite pas à faire dans ses articles un décryptage d’une décision de justice qui le concerne personnellement, à la transformer à son unique avantage, et à faire ce qu’il sait faire de mieux : la désinformation permanente.

Car, vous le comprendrez dans cette tribune, contrairement à son article, Jacques Trentesaux n’a pas triomphé dans le jugement de la Cour d’Appel de Douai du 29 août 2024 : il a été débouté de toutes ses demandes de dommages et intérêts, la Cour d’Appel a totalement annulé la décision de première instance en sa faveur ainsi que ses demandes complémentaires.

Certes selon les juges, sa faute pénale et civile à mon endroit n’a pas été suffisamment caractérisée, et donc n’a pas été constituée ni sanctionnée, mais j’ai bien été reconnue dans mon droit légitime à me défendre. 

Si Monsieur Trentesaux aime utiliser des mots sulfureux, alors la raclée judiciaire est aussi pour lui. 

Le 29 août dernier, la Cour d’appel de Douai a pris la décision de rejeter mon action civile à l’encontre de Monsieur Jacques Trentesaux, après un premier jugement de la chambre correctionnelle où il avait déjà été relaxé.

Pour mémoire, dans le cadre de la campagne des élections municipales de 2020 à Lille, où j’étais tête de liste, une rumeur relative à ma vie privée et plus précisément portant sur mes mœurs, est soudainement apparue. Il s’est rapidement avéré que Monsieur Jacques Trentesaux, rédacteur en chef de Médiacités, sous couvert de son statut de journaliste, avait créé, sinon alimenté cette rumeur nauséabonde. Il a tenté d’obtenir auprès de tiers, puis déclaré détenir, des photos pornographiques de moi,  affirmant même auprès de mon équipe de campagne s’être fait promettre la remise de ces documents sulfureux par une source anonyme, sans jamais qu’aucun débat d’intérêt général ne le justifie. Il a indiqué ne jamais avoir eu l’intention de les publier.

Il a ensuite dû concéder ne pas les posséder mais a souhaité poursuivre ses recherches, lors de multiples rendez-vous avec des Lillois, atteignant ainsi ma dignité, celle de ma famille et nuisant à ma campagne électorale lilloise, jusqu’à quelques jours du 1er tour des élections.

Cette méthode ne peut être celle d’un journaliste, quel qu’il soit, et devrait pouvoir être sanctionnée, au moins symboliquement. A mes yeux, aucune personne, et encore moins aucun journaliste formé, ayant à cœur de respecter la déontologie du métier, ne devrait voir la justice lui délivrer un “permis” de porter atteinte à la vie privée d’une personnalité publique, élue ou non, sans aucun intérêt journalistique. Et d’autant plus sur des sujets intimes et dégradants.

Cette décision de justice en ma défaveur m’a beaucoup appris.

  1. Sur la façon dont la justice fonctionne en France : complexe, lente, et inadaptée quand il s’agit d’élus ou de personnalités publiques,
  2. Sur l’ignorance de nombre d’élus locaux sur leurs droits, et la façon dont ils doivent mieux se défendre, 
  3. Sur la loi sur la liberté de la presse de 1881, qui, si elle protège le droit des journalistes dans notre pays, est aussi l’arme dont certains abusent, faisant fi de tous principes. 

J’ai exercé mes droits de femme, de citoyenne, d’élue et j’ai eu raison de le faire. Rien de procédurier, mais au contraire, un refus d’être salie sans résister, un refus du fatalisme qui fait que tant de fois, les victimes se taisent et laissent leurs agresseurs poursuivre leurs délits.

Si le comportement fautif de Monsieur Jacques Trentesaux n’a pas été reconnu, faute d’éléments de preuve suffisants, dans l’arrêt rendu le 29 Août 2024 par la Cour d’appel de Douai, il a toutefois reconnu le caractère non abusif de mon action en justice, en infirmant partiellement le jugement de première instance, ce qui est une victoire à mes yeux : l’arrêt a précisé que je ne pouvais « être considérée comme ayant agi de mauvaise foi ou de manière téméraire ». La Cour a donc débouté Monsieur Jacques Trentesaux de toutes ses demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive, et annulé les 6000 euros de dommages qui m’avaient été imposés au premier jugement. 

Je me vois donc seulement condamnée au titre des frais de procédure engagés par la partie adverse, ce qui est normal en cas de relaxe de l’accusé.

Cela montre à quel point la Cour d’Appel a été dans la difficulté concernant mon affaire : pas de faute pénale caractérisée, pas de harcèlement reconnu, pas de faute civile sur ma dignité, puisque le journaliste n’a pas fait d’article, mais reconnaissance de mon droit à l’attaquer en justice, au regard des faits qu’il a lui-même reconnus.

1. Sur la façon dont la justice fonctionne en France : complexe, lente, et inadaptée quand il s’agit d’élus ou de personnalités publiques

Après les faits, début 2020, j’ai souhaité porter plainte. J’ai trouvé un avocat pénaliste. Je suis allée au commissariat porter plainte avec lui, relater les faits, apporter les témoignages, ce qui m’était raconté sur les rumeurs propagées par Jacques Trentesaux.

L’OPJ qui nous a reçus a qualifié les faits de “chantage”.

Le parquet a décidé de poursuivre et d’enquêter, convoquant Monsieur Trentesaux et les témoins. Témoins qui étaient des élus ou des salariés dans la politique, très inquiets de témoigner contre le rédacteur en chef d’un journal d’investigation. Et qui se sont réduits à peau de chagrin au fur et à mesure de l’année d’enquête.

Un an et demi après ma plainte, je suis informée du classement sans suite pour infraction “insuffisamment caractérisée”.

Il m’est reproché d’avoir porté plainte pour “chantage”. Mais à aucun moment je n’ai utilisé ce mot en racontant les faits au policier. Ce n’est pas à la victime de qualifier correctement les faits. C’est au parquet !

Mon avocat m’écrit en mai 2022, deux ans après  : “En dépit des déclarations de Monsieur Jacques Trentesaux, le Vice-Procureur a pris la décision, le 7 juin 2021, de classer sans suite la plainte. Conformément à ce que nous avons décidé, j’ai ressaisi le Parquet afin qu’il réexamine le dossier, à la fois sur l’infraction de chantage, et sur une éventuelle infraction d’harcèlement sexuel. Le Parquet nous a récemment fait savoir qu’il n’entendait pas poursuivre. Clairement, le Procureur de la République estime que Monsieur Trentesaux pourra toujours s’abriter sous sa qualité de journaliste, et qu’en toute hypothèse, il n’a jamais indiqué qu’il publierait des photographies qu’il a prétendu dans un 1er temps détenir, puis obtenir rapidement. Il est vrai par ailleurs que les faits, aussi intimidants qu’ils soient, sont difficilement qualifiables par la loi pénale”.

C’est sur la qualification de harcèlement sexuel que nous avons décidé ensuite de faire une citation directe, qui a abouti à sa relaxe et à ma condamnation pour procédure abusive en première instance. On marche sur la tête !

Clairement, après 4 ans de procédure, je comprends que c’est le sujet de l’atteinte à la vie privée qui aurait dû dès le début être invoqué, le sujet des droits de l’homme, du droit à la dignité. Le chemin choisi dès la plainte conditionne tout le chemin judiciaire.

Chantage, harcèlement, harcèlement sexuel, atteinte à la vie privée ? Ce serait à la victime d’être responsable de la qualification du délit ? Moi ce que je sais, c’est que personne, et encore moins un journaliste, ne devrait avoir le droit de salir la réputation d’une femme sans être sanctionné. Même si au final, il n’a jamais écrit d’article à ce sujet.

C’est à la justice, à la police, au parquet, de faire en sorte que les qualifications du délit puissent être jugées.

2. Sur l’ignorance de nombre d’élus locaux sur leurs droits, et la façon dont ils doivent mieux se défendre. 

Plainte simple au commissariat, plainte auprès du Procureur par lettre, plainte avec constitution de partie civile… Encore aujourd’hui, les nuances juridiques entre les différentes procédures sont floues à mes yeux, alors que le choix des modalités d’action sont déterminants dans la capacité à être entendu par la Justice.

En discutant avec des collègues, des élus locaux, j’ai compris que beaucoup d’entre eux souffraient de la diffamation sur les réseaux sociaux, des menaces, des injures, avec un sentiment d’impunité très répandu. Et un jour, c’est un Procureur dans une réunion sur la sécurité des élus qui a répondu à une question : “Ah non, ne portez pas plainte pour diffamation, vous perdrez à chaque fois, c’est la loi de 1881 qui sera invoquée. Il faut faire une plainte pour outrage, c’est plus simple, c’est au pénal ! “.

Mais quel élu peut connaître ces nuances, si subtiles au démarrage, mais qui pour les mêmes faits, vont changer le cours des poursuites judiciaires? 

Les élus et les candidats doivent bénéficier dans toutes les préfectures françaises d’un accompagnement judiciaire spécifique, au regard de leur surexposition publique, de la rapidité avec laquelle ils doivent agir, et du peu de moyens qu’ils ont. Ils doivent être formés, alertés, soutenus.

Au risque sinon d’un désengagement réel dans les élections notamment locales, une désaffection que nous constatons de plus en plus.

3. Sur la loi sur la liberté de la presse de 1881, qui, si elle protège le droit des journalistes dans notre pays, est aussi l’arme dont certains abusent, faisant fi de tous principes. 

Le jugement en première instance qui relaxe Jacques Trentesaux, puis celui de la Cour d’Appel, signifient que n’importe quel journaliste en France, pourrait, sous prétexte d’enquêter, inventer une rumeur horrible et dégradante sur n’importe quel élu ou candidat, la colporter partout dans son territoire, nuire à sa réputation et à son honneur, cela sans jamais être sanctionné, quelle que soit l’invention.

Je persiste donc à considérer que le comportement de M. Trentesaux, a porté atteinte à ma dignité de femme, d’élue de la République, ainsi qu’à mon honneur et à ma réputation. 

Si M. Trentesaux avait pris le soin de s’excuser ou, à tout le moins, de faire preuve d’empathie, j’aurais probablement mis un terme à cette procédure. Il a, au contraire, cru devoir triompher et ironiser publiquement. Il a tenté de faire croire à une manœuvre du « pouvoir », “une procédure-baillon” écrit même le Tribunal en première instance, ignorant les répercussions de son comportement.

Dans mon cas, qu’y aurait-il eu à “baillonner”, des photos inventées par un journaliste pervers, des révélations montées de toutes pièces par un professionnel véreux ? Là aussi on marche sur la tête. 

Cette attitude d’auto-promotion, là aussi bien peu déontologique, est à nouveau celle qu’il a choisi d’adopter dans un article paru le 4 septembre 2024, sobrement intitulé « la raclée judiciaire de la députée Violette Spillebout face à Médiacités » dans lequel le journaliste Jacques Trentesaux, écrit sur une affaire concernant le citoyen Jacques Trentesaux, non sans laisser croire que mon action judiciaire était dirigée contre Médiacités, (et pas contre lui), tout en rappelant les termes de la décision judiciaire de première instance invalidée par la Cour d’appel : Déontologie quand tu nous tiens !

L’affaire de la rumeur sur ma vie privée n’est en rien une attaque de la « Macronie » contre la presse, comme le laisse entendre M. Trentesaux. Il s’agit d’une histoire personnelle, la mienne et du comportement d’un journaliste qui ne saurait incarner l’ensemble des pratiques, et encore moins l’honneur de sa profession.

En assimilant explicitement ma démarche à une pratique qui serait courante au sein de la « Macronie », M. Trentesaux et son avocat, arguant d’un climat prétendument liberticide, ont ainsi explicitement demandé à la justice de me débouter en vertu d’un contexte politique et d’une pratique d’ordre général, les procédures-baillons visant explicitement à étouffer les médias. C’est ridicule, grossier et insultant. Cet argument opportuniste méprise le caractère personnel de mon droit citoyen à agir en tant que personne privée.

J’ai publié, au mois de janvier 2024, un livre dans lequel je reviens, dans un chapitre intitulé « Mon droit à la dignité » sur cette affaire et sur le comportement de Monsieur Jacques Trentesaux. 

Ce chapitre permet de mieux comprendre les raisons de mon action contre Monsieur Jacques Trentesaux et  justifie que j’ai pu percevoir la décision de 1ère instance, partiellement invalidée par la cour comme « un permis d’harceler, d’agresser et de diffamer ». 

A lire ici : L’Autre mur, Chapitre 4, Mon droit à la dignité

Conclusion

Le pire dans tout ça, est qu’on sent, dans mon affaire, que les juges estiment que quand on est candidat ou élu, et bien on “sait à quoi devoir d’attendre”, “c’est le prix à payer”, c’est normal qu’on soit menacé, sali, que çà enquête “tous azimuts”, quitte à ce que la famille, les proches, pâtissent de cette surexposition sur les réseaux sociaux ou dans les médias, ou subissent des inventions et des rumeurs dégradantes.

Quelque part, ce choix du parquet, qui ne qualifie pas correctement les faits, puis celui des juges de privilégier la soi-disant liberté d’une presse qui n’est en fait ici que la perversion profonde d’un manipulateur, ne fait que dégrader la valeur de l’engagement politique local ou national.

C’est très dangereux.

On doit pouvoir s’engager sans voir sa réputation salie, sa vie privée dégradée, sa famille menacée. C’est du bon sens, et c’est aussi du respect pour tous ceux qui ont le courage de s’engager pour l’intérêt général.

Accompagnée d’avocats, de procureurs, de juristes, tout autant motivés que moi pour protéger notre démocratie, je poursuivrai mon engagement pour consacrer l’engagement des élus dans les mandats locaux et nationaux et faire des propositions législatives utiles.

Je poursuivrai également mes travaux engagés sur l’évolution du droit de la presse, et notamment sur l’amélioration du respect déontologique au sein des médias.

Élus, comme journalistes : il est urgent de nous rapprocher des citoyens, et de retrouver leur confiance.