Ce vendredi, le comité départemental Nord de la République en Marche tient une conférence de presse en présence de Violette Spillebout et Valérie Petit, les deux adversaires dans la course à l’investiture LAREM pour les municipales à Lille. Mais aussi de Gérald Darmanin qui joue les Pygmalion pour le parti présidentiel au Nord et d’une belle brochette de parlementaires LAREM répartis entre les deux camps. Pour le ministre de l’action et des comptes publics, il s’agit d’apaiser les esprits échauffés après l’épisode roubaisien. Quand un comité local avait tenté de forcer la main pour s’imposer et dicter ses conditions au maire sortant divers droite et qui a provoqué le retrait de plusieurs parlementaires soutiens de leur consoeur Valérie Petit. Un pataquès qui prend sa source à Lille où la lutte entre les deux prétendantes fait rage (relire nosarticles). Trois scénarios sont sur le feu*.
Scénario n°1. Accord.
Valérie Petit et Violette Spillebout trouvent un terrain d’entente. Et se lancent ensemble et en même temps à l’assaut du beffroi. Mais qui en numéro 1 et en numéro 3 ? Et comment mélanger les soutiens de l’une avec ceux de l’autre quand Valérie Petit a accusé le camp d’en face d’intimidations (sans le prouver)? Ainsi les personnalités de la société civile ou les élus. On pense à Nicolas Lebas, le maire centriste de Faches-Thumesnil qui songe à tenter l’aventure en compagnie de Violette Spillebout (relire notre article). Et comment accorder les équipes respectives qui se livrent un combat sans merci depuis bientôt une année ? Le tandem est toujours théoriquement possible mais l’équilibre sera pratiquement difficile à obtenir.
En jeu, la victoire bien sûr, mais aussi la métropole européenne de Lille où les élus et conseillers En Marche pourraient faire une entrée en force et rebattre les cartes d’une majorité historiquement hétéroclite – les initiatives pour bâtir un groupe En Marche sont toutes restées dans l’oeuf mais on estime à une petite vingtaine le nombre d’élus “intéressés”, un chiffre qui sera évidemment à la hausse au printemps prochain. Et Gérald Darmanin a inscrit la MEL parmi ses priorités personnelles.
Scénario n°2. Pas d’accord.
Violette Spillebout à Lille, Valérie Petit ailleurs, ou l’inverse, Valérie Petit à Lille, Violette Spillebout hors jeu…Une dernière solution plus difficile puisque Violette Spillebout ne quadrille que Lille intra muros et concentre ses efforts sur la ville détenue par son ancienne patronne Martine Aubry, ce qui signifie qu’une des deux candidates devrait plier bagages et tirer un trait sur une carrière politique – ce qu’a laissé entendre Valérie Petit sans trop convaincre. La députée de la neuvième circonscription, un fief sous le ciseau d’un redécoupage, couvre un grand territoire qui va de Lille à Tourcoing. Elle dément vouloir défier le maire sortant de Marcq-en-Baroeul qu’elle a battu aux législatives. Bernard Gérard (LR) a reçu l’assurance de Gérald Darmanin qu’il ne serait pas inquiété par En Marche pour les municipales…(aux dernières européennes, la liste LAREM a obtenu dans la commune 35 % des suffrages contre 14% à la liste LR).
La capacité à nouer des alliances est un critère dans le choix de la candidate. Violette Spillebout campe au centre de l’échiquier lillois avec de solides accointances sur la gauche mais aussi au centre droit. Valérie Petit est au centre droit (le divers droite Jean-René Lecerf, ancien challenger en 2014, la soutient) et peut jeter des ponts avec la droite. Difficile de dire laquelle a le meilleur potentiel pour participer à une dynamique gagnante.
Dans tous les cas de figure, la MEL reste un objectif pour le ministre tourquennois qui a reçu mandat de régler les affaires de LAREM sur l’agglomération lilloise et le département. Son « darmaninland », le versant nord-est, s’est ainsi étoffé depuis quelques semaines et il surveille le dossier roubaisien comme le lait sur le feu avec d’autres ainsi celui de Lille. Il sait que la conquête du sceptre de la MEL ne sera pas une partie de plaisir (relire nos articles) après le tir croisé essuyé il y a quelques mois en pleine assemblée plénière et qui l’a laissé groggy (voir DailyNord). Il doit forcément trouver la meilleure martingale qui lui permette d’arrimer le maximum d’élus à sa cause. Et faire du futur groupe En Marche à la MEL le marchepied de ses ambitions.
– Scénario n°3. Un troisième nom ?
C’est parfois ce qui arrive quand un noeud gordien est trop serré. Mais le casting sonne creux même si le nom de Gérald Darmanin revient parfois. Alors qu’il avait renoncé après une décevante enquête d’opinion. Lâcher la proie tourquennoise pour l’ombre lilloise n’est pas une sinécure. Il ne serait pas bon que LAREM patauge encore plus longtemps après les tensions qui ont miné le comité départemental. Beaucoup de questions qui n’ont pas encore de réponse précise.
En cas de blocage, l’Elysée tranchera
Le rôle de la commission nationale d’investiture sera déterminant comme pour Paris, Lyon ou Marseille. Lille est une cible pour LAREM. Parce que le président de la République a un compte à régler avec Martine Aubry et son Macron « ras-le-bol ». C’est le conseiller d’Etat Alain Richard qui a auditionné les candidates la semaine dernière. La divergence de vues sinon le choc d’ego entre l’ancien ministre de la défense de Jospin et le jeune espoir du gouvernement est un risque. En cas de blocage persistant, c’est à l’Elysée que les choses seront tranchées. Mais Gérald Darmanin n’a pas les coudées franches à Lille et son soutien non équivoque à la députée Valérie Petit depuis plusieurs mois limite sa marge de manoeuvres et résonne comme un signe de partialité. Qui laissera des traces dans les mémoires. Au moment d’ouvrir les hostilités à la MEL, par exemple. Et quel que soit l’issue de l’arbitrage en cours.
* Les rédactions reçoivent en ce moment de drôles de messages en forme de fake news annonçant la décision pour ce soir ou pour mercredi prochain et privilégiant Valérie Petit…Décidément, le beffroi de la capitale des Flandres est de plus en plus nimbé d’un halo de mystères…