MUNICIPALES 2020PROTESTATION ÉLECTORALE

Élection à Lille de Martine Aubry: le rapporteur public rejette les recours d’EELV et de LREM

Ce n’est qu’un avis consultatif mais il est généralement suivi par le tribunal administratif, dont l’audience est attendue pour ce 18 février.

Trois recours contestent à la maire de Lille le droit de poursuivre sa tâche commencée en 2001. PHOTO PIB LA VOIX DU NORD – VDNPQR

Gagnante en juin dans les urnes de 227 voix au terme d’une journée où l’écologiste Stéphane Baly a pu rêver quelques minutes de s’asseoir dans le fauteuil de maire, Martine Aubry doit encore affronter le spectre d’une défaite sur tapis vert au tribunal administratif.

Trois recours contestent à la maire de Lille le droit de poursuivre sa tâche commencée en 2001, dont deux sont des protestations de Stéphane Baly et de la candidate LREM Violette Spillebout. Rendez-vous ce jeudi 18 février.

Mais rien est fait. Dans son avis consultatif transmis aux parties mardi et révélé par France 3, le rapporteur public, dont l’avis est généralement suivi, a cependant préconisé un rejet sur le fond de ces requêtes, qui seront examinées par le tribunal administratif de Lille.

«Curieuse de découvrir ses motivations», Mme Spillebout a néanmoins dit à l’AFP sa «confiance» dans la justice. «C’est un avis important, mais pas la décision. Nous attendons sereinement la décision du tribunal», a commenté de son côté le 2ème adjoint de Mme Aubry, Arnaud Deslandes.

Au soir du second tour le 29 juin, Mme Aubry fait figure de rescapée, de la vague verte qui déferle sur plusieurs grandes villes, mais aussi d’une campagne qu’elle s’adjuge d’un rien, devant son ex-allié au conseil municipal, Stéphane Baly (39,4%), qui devance dans une triangulaire sa propre ancienne directrice de cabinet Violette Spillebout (20,6%).

Mais le quatrième mandat de l’ancienne ministre du Travail, 70 ans, est à peine acté lors du conseil municipal du 3 juillet que ses deux rivaux annoncent des recours.

Deux principaux types d’arguments seront soulevés par les opposants de Mme Aubry: sur l’authenticité du scrutin et sur les irrégularités durant la campagne.

Des signatures, une boxeuse et un mail

Concernant les irrégularités, le grief essentiel porte sur des différences de signatures sur les registres de vote entre les deux tours. «Sur 70 bureaux de vote vérifiés sur 130, nous avons relevé plus de 350 signatures différentes. Et l’immensité d’entre elles est radicalement différente», affirme Me Muriel Ruef, avocate de la liste EELV. De quoi «altérer la sincérité du scrutin», appuie Me Héloïse Hicter, pour la liste Spillebout.

Sur la campagne elle-même, deux éléments ont singulièrement fait tiquer l’opposition. D’abord ce qu’elle dénonce comme l’embauche par la mairie, au lendemain du premier tour, de la boxeuse Licia Boudersa, figure du quartier populaire des Bois-Blancs. La triple championne du monde poids plume aurait «accepté d’être relais d’opinion de la liste Aubry en contre-partie d’un emploi», dénonce Me Hicter. Contactée par l’AFP, la boxeuse n’a pas donné suite.

Un mail envoyé avant le premier tour à la majorité des associations lilloises, les appelant à soutenir Mme Aubry, est également dans le viseur : il a été adressée – depuis sa boîte personnelle – par la présidente de l’ALFPH, une association qui milite pour le lien social, largement financée par la mairie. Cette responsable a depuis plaidé auprès de La Voix du Nord une «erreur d’aiguillage», mais pour les avocats de l’opposition, il y a bien eu là «utilisation des moyens de la commune» pour orienter le résultat du scrutin.

«Prêts» pour une nouvelle campagne

La liste Spillebout dénonce aussi «une confusion des comptes twitter de Mme Aubry», son «compte officiel de maire renvoyant vers celui de candidate», ou encore l’utilisation de la mairie «comme local de campagne».

S’ils devaient remporter la victoire juridique, les deux anciens candidats se disent «prêts» à repartir en campagne.

Mme Spillebout assure même «avoir tendu la main» aux Verts «pour un partenariat, et mettre fin à un système qui a duré trois mandats». Cet projet d’alliance avait échoué en 2020 : «politiquement, j’ai un ennemi, qui est LREM, liste siamoise avec LR», avait alors cinglé M. Baly.

Alors que la rupture semble définitivement consommée avec Mme Aubry – «les neuf premiers mois de mandat ont donné lieu à un nombre importants de désaccords, de fond comme de forme» – M. Baly, lui, temporise : «avec les recours, les élections pourraient ne pas se tenir avant fin 2021. C’est le projet qui sera déterminant».

Voix du Nord du 16/02/2021