CONSEIL MUNICIPALTRIBUNE

L’honorariat municipal n’exonère d’aucune poursuite judiciaire.

L’honorariat municipal n’exonère d’aucune poursuite judiciaire.

Ce vendredi 20 juin, le Conseil municipal de Lille a adopté le vœu demandant aux services préfectoraux de conférer à Martine Aubry le titre de Maire honoraire. Un usage républicain classique, déjà appliqué à Pierre Mauroy, qui salue des décennies d’engagement public. Comme l’ensemble des élus lillois, j’ai voté ce vœu, par respect pour la tradition française et les élus locaux — je n’allais tout de même pas gâcher les honneurs symboliques réservés à notre ancien maire.

Ce titre, attribué par arrêté préfectoral, est “automatique” : il est lié à la durée d’exercice d’un mandat local et ne peut être refusé que “si l’intéressé a été condamné à une peine d’inéligibilité”.

C’est précisément là que l’on mesure combien la lenteur de la justice nuit à la qualité de l’exercice démocratique. Plusieurs procédures judiciaires concernant Martine Aubry ne sont toujours ni closes ni jugées — notamment l’enquête préliminaire en cours pour emploi fictif et trafic d’influence dans le cadre de l’embauche d’une sportive de haut niveau à la mairie de Lille, en période électorale — ou ont fait l’objet d’un rapide classement sans suite, comme celui de l’utilisation des chauffeurs de la mairie à des fins privées, sans que l’accès au dossier d’enquête de la police judiciaire ne puisse être obtenu malgré relance.

Car ne soyons pas dupes : si l’honneur est un titre, il doit aussi correspondre à une conduite intègre. Ces éléments suffisent à interroger la légitimité morale de cet honorariat. Et le pire est, hélas pour les Lillois, à venir, avec un signalement adressé au Parquet d’Amiens concernant des faits engageant sa responsabilité dans les suites d’un délit routier particulièrement grave, et dans les pressions qui ont été faites pour étouffer l’affaire.

Dans l’exercice de mon mandat de conseillère municipale, comme dans mes travaux parlementaires, je suis particulièrement attentive aux manquements de certains responsables politiques, aux décisions incompréhensibles de certains magistrats, et à l’absence de prise en compte de la souffrance des victimes dans l’information des parquets. Ces constats découragent, écœurent, et alimentent chaque jour davantage la défiance des Français envers la justice. Il ne faut rien lâcher. Pour que les citoyens respectent nos lois, pour que nos jeunes croient aux principes de la République, encore faut-il leur démontrer que la justice est exemplaire, que les responsables politiques sont exemplaires, et que la justice à l’égard des élus est ferme, impartiale, et non à géométrie variable selon les étiquettes politiques.

Le jour où la justice rendra ses décisions, s’il y a condamnation, je demanderai à Martine Aubry de renoncer à ce titre. Et si elle s’y refuse, je solliciterai formellement l’État pour que cette distinction lui soit retirée.

L’honorariat n’est pas une immunité.

Conseillère Municipale de Lille – Députée du Nord.